Wednesday 16 May 2012

Pour les insomniaques

Plus tard dans la nuit, l'insomnie fit remonter a la surface le Traité de la ponctuation de Jacques Drillon que j'avais acheté lors de mon année d'étude, 1991, paniqué a l'idée qu'on eut pu consacrer deux cents pages d'un livre de six cents à la virgule (…)
Maudite insomnie. Un bruit, un rêve, un chien, une minuscule modification de la nuit et voilà, si petite soit-elle, qu'une part de vous ne se livre plus pleinement au sommeil - et que soudain cette part accroche une idée, une idée dont on sent qu'elle pourrait tourner longtemps avec vous dans les draps. Si l'on tient a dormir encore, cette idée il est de toute première urgence de l'éteindre : c'est une question de milliseconde. Mais attention : pas de brusquerie, pas à la lance de pompiers : il ne s'agirait pas de secouer trop de chimie la-dedans et que ça s'emballe et que tout le cerveau comprenne qu'en douce on est parti à la chasse a l'idée et veuille participer. L'éteindre plutôt au compte-gouttes. Donc, et c'est bien la difficulté, avec une dépense d'énergie proche du néant en même temps qu'une acuité et une accélération foudroyantes - que cette idée dissidente n'ait ni le temps de se propager ni même celui de gonfler tant soit peu - et qu'une fois occise, le sommeil, promptement, recontamine la part de vous qu'il venait de perdre quelques secondes…
Raté donc. Nuit de virgules.

- Frederic Lecloux

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